воскресенье, 12 мая 2024 года   

Les secrets du Gstaad Palace

16.04.2024
(DR)

Le Palace, la comédie noire de Roman Polanski ayant eu don de susciter les réactions polaires, est sortie sur les écrans suisses – d'abord dans la partie alémanique et maintenant en Romandie. L'accueil réservé a provoqué notre curiosité.

 Depuis 2009, soit à peu de choses près depuis le début de l'existence de Nasha Gazeta, je suis la triste saga du célèbre réalisateur franco-polonais Roman Polanski : le 26 septembre de cette année-là, la police procédait à son arrestation quasiment à même le tapis rouge du Festival du film de Zurich où il devait, le lendemain, recevoir un prix pour sa contribution à l'art. La cérémonie s’était alors vue reportée : c’est qu’en 1978, accusé d'avoir violé une jeune fille de 13 ans, Polanski avait dû quitter les États-Unis pour Londres, puis pour la France. Or il s’avérait que l'affaire n'était pas close et qu’un mandat d'arrestation, émis par un tribunal américain il y a plus de 30 ans, était toujours valable, de sorte que la police suisse le plaçait en détention. Depuis lors libéré, Polanski ne se sent pas pour autant le bienvenu en Suisse. C'est du reste pourquoi il a refusé de participer au Festival international de Locarno en 2014.

 Le choix du lieu de tournage de son dernier film, Le Palace, n'est sans doute pas fortuit : c'est à Gstaad, l'une des stations de montagne suisses les plus en vogue, que le réalisateur dut passer près d'un an en résidence surveillée, en attendant que justice soit faite. On pourrait même penser que sa satire de la société locale constitue sa petite vengeance ; auquel cas, personne ne pourrait lui reprocher de ne pas maitriser son sujet.

  Le tournage, qui s'est donc déroulé à Gstaad, fut promptement expédié : de février à juin 2022. La “première” eut lieu hors compétition lors de la 80e Mostra de Venise en 2023. Le film reçut une ovation de trois minutes. Le 28 septembre de la même année, il sortait en Italie et le 3 octobre il était présenté au Festival du film de Zurich. Il a ensuite pu être visionné en Pologne, en Russie, en Hongrie, en Lituanie et en Bulgarie. Dans le même temps, il ne se trouvait aucun distributeur aux États-Unis ni en Grande-Bretagne : il est possible que leurs experts n'aient vraiment pas aimé le film (le critique de Time Out a dit de lui : "Eurotrash hotel farce - an absolute stinker") ; peut-être aussi a-t-il déplu pour des raisons morales – les critiques d'art se prennent parfois pour des puritains ! Cela dit, si l'on en croit la RTS, lorsque le film a été projeté fin 2023 à Gstaad, il a attiré un nombre record de spectateurs au sein du cinéma local. Apparemment, les habitants ont un bon sens de l'humour et comprennent qu'« il ne faut pas blâmer le miroir (lire : le réalisateur) quand... ». Et ainsi de suite, selon le célèbre texte de Gogol.

 En général et à mon humble avis, le film s'inspire beaucoup de Gogol, et ceci outre les « noms de famille parlants » tels que Bill Crush. Tout comme dans la comédie Le Révizor, où l’ensemble de la noblesse d'une ville de province apparaît au spectateur, ici, c'est la noblesse internationale qui est montrée. La variété des clients de l'hôtel le plus chic de la station est aussi internationale que les acteurs qui interprètent leurs rôles. L'allemand Oliver Masucci est magnifique dans le rôle du directeur de l'hôtel Hansueli Kopf ; la star française Fanny Ardant dans celui de la marquise qui ne dédaigne pas la compagnie d'un plombier polonais, reconnaissable grâce aux vielles affiches de l'UDC n'ayant rien perdu de leur pertinence. L'Anglais John Cleese est splendide dans le rôle du milliardaire Arthur William Dallas III, 97 ans, venu à Gstaad pour célébrer son premier anniversaire de mariage avec sa plantureuse épouse de 22 ans, Magnolia : hélas le cœur du gentleman flanche au moment le plus "romantique", ce qui ne n’empêche pas la heureuse élue de faire tout ce qu'il faut pour obtenir l'héritage. Le Portugais Joaquim de Almeida est très convaincant dans le rôle du chirurgien esthétique Dr Lima, dont la femme souffre d'Alzheimer ­– ce qui, probablement, est le meilleur moyen à sa disposition pour se débarrasser des mondaines vieillissantes qui persécutent son mari. L'artiste uruguayen Luca Barbareschi est incomparable dans le rôle de l'ancienne star du porno Bongo. Non moins impressionnant, l'ancien boxeur professionnel américain Mickey Rourke, devenu star du cinéma, incarne le rôle d'un escroc patenté qui refuse de reconnaître son fils conçu dans une ville tchèque, qui lui ressemble pourtant comme deux gouttes d'eau. Bien sûr, au nombre des invités, il y a aussi des Russes – des hommes riches (interprétés notamment par Alexander Petrov) et leurs campagnes de pacotille, débarquant au Gstaad Palace fort de valises pleines de dollars. À ce sujet, d’'ailleurs, certains critiques ont reproché au cinéaste qu'« il n'y a plus de Russes comme ça ». C'est ma fois vrai, mais, d’une part, l'action se déroule à la veille de l'an 2000 et, d’autre part, à présent qu'il est devenu plus difficile d'établir des relations avec les banques européennes, n'est-il pas pensable de les voir ressusciter ? L'ambassadeur russe et son épouse sont eux aussi reconnaissables ­– c'est d’ailleurs Madame qui figure sur l'affiche du film, le visage affaissé dans son assiette. En descendant dans le bunker pour réceptionner les précieuses valises, son mari lui a pourtant demandé de « garder le contrôle », mais elle n’a pas pu empêcher – cela arrive !

 Oui, toute cette ménagerie humaine est réunie dans un luxueux hôtel pour fêter l'an 2000, le début du nouveau millénaire, alors que – souvenez-vous – beaucoup prédisaient la fin du monde ou un bug technologique universel. Tous sont riches, et chacun a ses particularités et exigences : de l'herbe fraîche dans la neige, sans laquelle le chien nain de la Marquise ne peut faire ses besoins, au pingouin vivant commandé par un milliardaire pour sa femme. Mais tout le monde n'est pas venu pour les vacances. Billy Crush profite de son séjour en Suisse pour monter une escroquerie financière avec l'aide de son banquier Caspar Tell (un autre nom de famille parlant) : se trouvant par hasard dans un milieu qui n’est pas le sien, ce dernier se révèle tout aussi corrompu que les autres… ce n'est qu'une question de prix.

 Connaissant assez bien Gstaad et son beau monde, j’ai copieusement ri en regardant le film. Jusqu'à ce que Boris Eltsine apparaisse à l'écran, annonçant qu'il quittait le pouvoir et le cédait à Vladimir Poutine. Aujourd'hui, 24 ans plus tard, Vladimir Poutine est toujours « à la télé ». Peu de choses ont changé au Gstaad Palace également, où on déroulera toujours le tapis rouge devant les riches Russes et exaucera tous leurs souhaits, même les plus absurdes – le prestige du service suisse oblige !

 Bien sûr, ce film est une caricature cruelle et tous les personnages sont laids – sinon physiquement, du moins moralement. Mais si Umberto Eco a pris la peine d’écrire un fort volume sur l'histoire de la laideur dans l'art, pourquoi ne pas consacrer un film de deux heures à ce sujet dans la vie réelle ? D'ailleurs, de tels "personnages" existent vraiment. Vous ne me croyez pas ? Essayez de fêter le prochain réveillon du Nouvel An au Gstaad Palace.

 

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A PROPOS DE CE BLOG

Nadia Sikorsky a grandi à Moscou, où elle a obtenu un master de journalisme et un doctorat en histoire à l’Université d’Ètat de Moscou. Après 13 ans au sein de l’Unesco à Paris puis à Genève, et exercé les fonctions de directrice de la communication à la Croix-Verte internationale, fondée par Mikhaïl Gorbatchev, elle développe NashaGazeta.ch, quotidien russophone en ligne.

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