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L’accent russe | Le blog de Nadia Sikorsky

19.09.2023
Photo © Nashagazeta

Vous avez jusqu’à 28 janvier 2024 pour découvrir l’artiste légendaire géorgien Niko Pirosmani, né Nikolaï Pirosmanishvili, présenté actuellement à la Fondation Beyeler, à Bâle.

Par hasard, j’ai appris que cette exposition aurait lieu avant que le musée n’ait envoyé l’annonce. Cet été, à Tbilissi, la capitale géorgienne, j’ai vu, sur la façade du musée Pirosmani, une énorme affiche informant les passants que la majeure partie de la collection se trouvait alors au Louisiana Museum of Modern Art, Danemark, d’où elle partirait pour Bâle. Quelle bonne nouvelle, tant ce peintre mérite d’être mieux connu !

Cependant, si vous n’avez jamais entendu parler de lui, ne vous tracassez pas. La plupart des Russes ont découvert son existence il y a un peu plus de trente ans, quand un des premiers restaurant privés, « Chez Pirosmani », a ouvert ses portes à Moscou, orné de reproductions des œuvres de Niko Pirosmani – élément majeur du décor intérieur. Et pourtant les originaux, si appréciés par Pablo Picasso et souvent comparés aux peintures de Vincent van Gogh, d’Henri Rousseau et de Marc Chagall, ne se trouvent pas seulement au Musée national géorgien, mais aussi à la Galerie Tretiakov et au Musée d’art contemporain de Moscou, au Musée russe de Saint-Pétersbourg et dans de nombreuses collections privées. Quant aux restaurants qui ont repris la formule moscovite, ils sont innombrables, non seulement en Russie mais aussi à Tallinn, à Francfort, à Paris… Du reste, il en existe également un à Lausanne (Le Pré-Fleuri), où la cuisine géorgienne est délicieuse.

NIKO PIROSMANI, FIVE PRINCES CAROUSING Oil on oilcloth, 104 x 195 cm The Collection of Shalva Amiranashvili Museum of Fine Arts of Georgia, Georgian National Museum, Tbilisi © Infinitart Foundation

Je vous épargnerai sa biographie que vous trouverez ailleurs, mais attirerai votre attention sur le fait qu’elle est pleine d’imprécisions, de lacunes et de légendes. Même la date de naissance de l’artiste n’est pas confirmée à cent pour cent ; on présume qu’il est né le 17 mai 1862, dans un village de Kakhétie, la région des vignobles, dans une famille de paysans pauvres. Autodidacte, il a appris à lire en russe et en géorgien – la Géorgie faisant à l’époque partie de l’Empire russe. Pirosmani changeait fréquemment de métier : tantôt employé d’une typographie ou des chemins de fer, tantôt berger.

Les peintres itinérants russes lui ont servi de maîtres, lui qui peignait depuis son plus jeune âge sur tout ce qui lui tombait sous la main, et particulièrement sur les toiles cirées des bistros. Sa situation financière s’empira en août 1914 quand, du fait de la Première Guerre mondiale, le gouvernement russe introduisit la prohibition : il faut dire que les enseignes des débits de boissons furent la principale source de revenus de Pirosmani. Solitaire et très pauvre, un peu bizarre selon l’avis de ses contemporains, il se couchait souvent le ventre vide dans les caves des immeubles. Ainsi mourut-il le 7 avril 1918, de faim et de maladie, dans la cave d’un immeuble sis dans une rue qui, dans la Tbilissi moderne, porte son nom. Nous ne savons pas précisément où il est enterré, probablement dans la fosse commune d’un cimetière des pauvres. Mais une pierre tombale portant son nom et les dates de sa vie est apparue au sein du Panthéon national – personne ne sait comment. 

NIKO PIROSMANI, ROE DEER AND LANDSCAPE Oil on cardboard, 98.5 x 70.5 cm The Collection of Shalva Amiranashvili Museum of Fine Arts of Georgia, Georgian National Museum, Tbilisi © Infinitart Foundation

Malgré cette âpre vie, ses tableaux sont pleins de joie – les grandes fêtes traditionnelles géorgiennes comptent parmi ses sujets préférés, de même que les animaux, qui, selon le peintre Lado Goudiashvili, arborent tous les grands yeux de Pirosmani. Regardez-les bien car, on le sait : les yeux sont le miroir de l’âme.

De toutes les légendes qui entourent la vie de Niko Pirosmani, j’aimerais vous en conter une : celle de son amour pour l’actrice française Marguerite de Sèvres – à croire qu’il y avait vraiment quelque chose de magique dans ce prénom ! L’histoire veut qu’au début du XXe siècle cette femme, alors âgée d’une vingtaine d’années, soit arrivée dans l’Empire russe avec la troupe itinérante « Belle vue ». Pirosmani, qui l’avait aperçue lors de sa performance à Tiflis (l’ancien nom de Tbilissi) en tomba amoureux. Quelques jours plus tard un chariot couvert de fleurs apparut devant l’hôtel où logeait Marguerite : des roses, des lilas, des anémones, des pivoines… Habituée à ce genre d’attention, Marguerite présuma que c’était là le cadeau d’un admirateur fortuné. Elle ne pouvait imaginer que pour produire ce geste extravagant, le pauvre Niko avait vendu ses derniers biens ! Lorsqu’elle l’apprit, elle descendit dans la rue et l’embrassa sur la bouche. C’est tout. Sa tournée terminée, elle repartit et ils ne se revirent plus jamais. En souvenir de cette rencontre, Niko Pirosmani exécuta en 1909 le portrait intitulé L’actrice Marguerite qu’il dota de traits caractéristiques géorgiens.

Niko Pirosmani, The Actress Margarita. Oil on oilcloth, 115.9 x 94 cm The Collection of Shalva Amiranashvili Museum of Fine Arts of Georgia, Georgian National Museum, Tbilisi © Infinitart Foundation

Or voilà qu’en 1968, poursuit la légende, donc cinquante ans après la mort de Pirosmani, ses œuvres ont été exposées au Louvre. Un jour, une dame âgée est arrivée, s’est approchée du portrait de Marguerite et l’a contemplé pendant un long moment, les joues couvertes de larmes. Oui, c’était elle ! Elle avait bien emporté avec elle des lettres de Pirosmani, seulement les membres de la délégation géorgienne n’avaient pas osé les prendre avec eux – les contacts avec des étrangers n’étant pas encouragés en Union soviétique. Nous ne savons ni ce qui est arrivé à ces lettres, ni quand et comment Marguerite est décédée. 

Nous ignorons également si cette histoire est vraie, mais elle a incité le grand poète russe Andreï Vosnessenski à écrire un poème qui fut mis en musique par le compositeur estonien Raymond Pauls et chanté par Alla Pougatcheva : les fleurs variées y sont remplacées par des seules roses rouges, mais par un million de roses ! Le nom de Niko Pirosmani n’est cependant pas mentionné. Pour utiliser le jargon d’aujourd’hui, c’était un hit des années 1980.

PS Hier, il y a eu un souci technique avec l'envoie de ce texte. Je présente mes excuses à ceux qui le recoivent en double. 

18.09.2023
Photo © Nashagazeta

Vous avez jusqu’à 28 janvier 2024 pour découvrir l’artiste légendaire géorgien Niko Pirosmani, né Nikolaï Pirosmanishvili, présenté actuellement à la Fondation Beyeler, à Bâle.

Par hasard, j’ai appris que cette exposition aurait lieu avant que le musée n’ait envoyé l’annonce. Cet été, à Tbilissi, la capitale géorgienne, j’ai vu, sur la façade du musée Pirosmani, une énorme affiche informant les passants que la majeure partie de la collection se trouvait alors au Louisiana Museum of Modern Art, Danemark, d’où elle partirait pour Bâle. Quelle bonne nouvelle, tant ce peintre mérite d’être mieux connu !

Cependant, si vous n’avez jamais entendu parler de lui, ne vous tracassez pas. La plupart des Russes ont découvert son existence il y a un peu plus de trente ans, quand un des premiers restaurant privés, « Chez Pirosmani », a ouvert ses portes à Moscou, orné de reproductions des œuvres de Niko Pirosmani – élément majeur du décor intérieur. Et pourtant les originaux, si appréciés par Pablo Picasso et souvent comparés aux peintures de Vincent van Gogh, d’Henri Rousseau et de Marc Chagall, ne se trouvent pas seulement au Musée national géorgien, mais aussi à la Galerie Tretiakov et au Musée d’art contemporain de Moscou, au Musée russe de Saint-Pétersbourg et dans de nombreuses collections privées. Quant aux restaurants qui ont repris la formule moscovite, ils sont innombrables, non seulement en Russie mais aussi à Tallinn, à Francfort, à Paris… Du reste, il en existe également un à Lausanne (Le Pré-Fleuri), où la cuisine géorgienne est délicieuse.

NIKO PIROSMANI, FIVE PRINCES CAROUSING Oil on oilcloth, 104 x 195 cm The Collection of Shalva Amiranashvili Museum of Fine Arts of Georgia, Georgian National Museum, Tbilisi © Infinitart Foundation

Je vous épargnerai sa biographie que vous trouverez ailleurs, mais attirerai votre attention sur le fait qu’elle est pleine d’imprécisions, de lacunes et de légendes. Même la date de naissance de l’artiste n’est pas confirmée à cent pour cent ; on présume qu’il est né le 17 mai 1862, dans un village de Kakhétie, la région des vignobles, dans une famille de paysans pauvres. Autodidacte, il a appris à lire en russe et en géorgien – la Géorgie faisant à l’époque partie de l’Empire russe. Pirosmani changeait fréquemment de métier : tantôt employé d’une typographie ou des chemins de fer, tantôt berger.

Les peintres itinérants russes lui ont servi de maîtres, lui qui peignait depuis son plus jeune âge sur tout ce qui lui tombait sous la main, et particulièrement sur les toiles cirées des bistros. Sa situation financière s’empira en août 1914 quand, du fait de la Première Guerre mondiale, le gouvernement russe introduisit la prohibition : il faut dire que les enseignes des débits de boissons furent la principale source de revenus de Pirosmani. Solitaire et très pauvre, un peu bizarre selon l’avis de ses contemporains, il se couchait souvent le ventre vide dans les caves des immeubles. Ainsi mourut-il le 7 avril 1918, de faim et de maladie, dans la cave d’un immeuble sis dans une rue qui, dans la Tbilissi moderne, porte son nom. Nous ne savons pas précisément où il est enterré, probablement dans la fosse commune d’un cimetière des pauvres. Mais une pierre tombale portant son nom et les dates de sa vie est apparue au sein du Panthéon national – personne ne sait comment. 

NIKO PIROSMANI, ROE DEER AND LANDSCAPE Oil on cardboard, 98.5 x 70.5 cm The Collection of Shalva Amiranashvili Museum of Fine Arts of Georgia, Georgian National Museum, Tbilisi © Infinitart Foundation

Malgré cette âpre vie, ses tableaux sont pleins de joie – les grandes fêtes traditionnelles géorgiennes comptent parmi ses sujets préférés, de même que les animaux, qui, selon le peintre Lado Goudiashvili, arborent tous les grands yeux de Pirosmani. Regardez-les bien car, on le sait : les yeux sont le miroir de l’âme.

De toutes les légendes qui entourent la vie de Niko Pirosmani, j’aimerais vous en conter une : celle de son amour pour l’actrice française Marguerite de Sèvres – à croire qu’il y avait vraiment quelque chose de magique dans ce prénom ! L’histoire veut qu’au début du XXe siècle cette femme, alors âgée d’une vingtaine d’années, soit arrivée dans l’Empire russe avec la troupe itinérante « Belle vue ». Pirosmani, qui l’avait aperçue lors de sa performance à Tiflis (l’ancien nom de Tbilissi) en tomba amoureux. Quelques jours plus tard un chariot couvert de fleurs apparut devant l’hôtel où logeait Marguerite : des roses, des lilas, des anémones, des pivoines… Habituée à ce genre d’attention, Marguerite présuma que c’était là le cadeau d’un admirateur fortuné. Elle ne pouvait imaginer que pour produire ce geste extravagant, le pauvre Niko avait vendu ses derniers biens ! Lorsqu’elle l’apprit, elle descendit dans la rue et l’embrassa sur la bouche. C’est tout. Sa tournée terminée, elle repartit et ils ne se revirent plus jamais. En souvenir de cette rencontre, Niko Pirosmani exécuta en 1909 le portrait intitulé L’actrice Marguerite qu’il dota de traits caractéristiques géorgiens.

Niko Pirosmani, The Actress Margarita. Oil on oilcloth, 115.9 x 94 cm The Collection of Shalva Amiranashvili Museum of Fine Arts of Georgia, Georgian National Museum, Tbilisi © Infinitart Foundation

Or voilà qu’en 1968, poursuit la légende, donc cinquante ans après la mort de Pirosmani, ses œuvres ont été exposées au Louvre. Un jour, une dame âgée est arrivée, s’est approchée du portrait de Marguerite et l’a contemplé pendant un long moment, les joues couvertes de larmes. Oui, c’était elle ! Elle avait bien emporté avec elle des lettres de Pirosmani, seulement les membres de la délégation géorgienne n’avaient pas osé les prendre avec eux – les contacts avec des étrangers n’étant pas encouragés en Union soviétique. Nous ne savons ni ce qui est arrivé à ces lettres, ni quand et comment Marguerite est décédée. 

Nous ignorons également si cette histoire est vraie, mais elle a incité le grand poète russe Andreï Vosnessenski à écrire un poème qui fut mis en musique par le compositeur estonien Raymond Pauls et chanté par Alla Pougatcheva : les fleurs variées y sont remplacées par des seules roses rouges, mais par un million de roses ! Le nom de Niko Pirosmani n’est cependant pas mentionné. Pour utiliser le jargon d’aujourd’hui, c’était un hit des années 1980 ; je vous invite à l’écouter.

06.09.2023
Photo © Nashagazeta

J’aime énormément le festival « Le livre sur les quais » : durant le weekend où il a lieu, il fait toujours beau (touchons du bois…) ; on y assiste à des débats passionnés et passionnants ; on y découvre de nouveaux auteurs et leurs livres. J’y vais chaque année – par plaisir et par obligation – car il y a invariablement un auteur russophone que j’ai envie d’interviewer. Sauf l’an dernier où aucun n’est venu. En revanche, cette année il y en a eu deux. Deux écrivains russophones qui ont du mal à se parler : la Russe Gouzel Iakhina, dont je vous ai récemment présenté le troisième roman (« L’humanité comme condition de la survie »), et l’Ukrainien Andreï Kourkov – je vous avais parlé en mars de cette année de son livre Journal d’une invasion, écrit en anglais. 

Je les aime beaucoup tous les deux ; ils sont publiés par le même éditeur suisse, Noir sur Blanc, que j’aime beaucoup également et dont je respecte énormément la position prise dès le début de la guerre en Ukraine, position simple et claire : « En ce temps de guerre, nous sommes en pensée avec le peuple ukrainien qui souffre et qui se bat, et avec tous les Russes qui refusent ce conflit. Ils sont nombreux. Vive l’Ukraine ! » Et oui, j’étais triste de voir les deux auteurs assis dans la « tente des dédicaces » à un mètre l’un de l’autre, avec le jeune auteur français Eden Levin entre eux. (Levin, comme le personnage de Léon Tolstoï.) Un auteur français en guise de zone tampon…

© Nashagazeta.ch

J’étais un peu mal à l’aise aussi car quelques jours auparavant, Andreï Kourkov avait refusé de m’accorder une interview. Ne comprenant pas pourquoi et trouvant la chose injuste, je me rendais à Morges avec un discours cassant tout préparé. Heureusement que je n’ai pas eu besoin de m’en servir !  Une fois arrivée, je suis allée directement vers lui et lui ai posé cette question : Pourquoi ? « Mais de quoi parlez-vous ?», m-a-t-il répondu en levant très haut ses sourcils. Bref, nous avons réglé le malentendu (car ce n’était rien d’autre) en deux minutes : la preuve que rien n’est plus efficace qu’un dialogue en tête à tête.

Puis nous avons parlé. Notre conversation a été désespérante par sa franchise. Pourtant, un autre point douloureux a pu être clarifié. Vous vous souvenez peut-être de ma désolation due au fait que le Journal d’une invasion avait été écrit en anglais et pas en russe – de même que tous les livres précédents d’Andreï Kourkov. Il s’avère que la raison en a été purement pragmatique et pratique, sans qu’il s’agisse là d’un rejet de la langue russe, comme j’avais cru le comprendre. L’auteur a commencé son travail en russe, puis s’est vu « bombardé » de demandes de contributions de la part de diverses éditions étrangères, surtout anglophones. Pour finir, au lieu de s’auto-traduire, il a continué en anglais. C’est tout. Le deuxième volume paraîtra bientôt, toujours en anglais, mais aussi en traduction ukrainienne. Et en russe ? lui ai-je naïvement demandé. « Mais où le publier ? Je ne suis plus édité en Russie, surtout en abordant un sujet pareil. Et les libraires d’Ukraine refusent d’accepter des livres écrits en russe, même publiés en Ukraine. » Andreï n’a toutefois pas l’air de s’en inquiéter.

Aujourd’hui, Andreï Kourkov est en train de terminer son nouveau roman – écrit en russe, cette fois-ci : un policier historique qui se déroule en 1919, lorsque Kiev a pour la deuxième fois été repris par les bolcheviks. J’ai hâte de le lire !

© Nashagazeta.ch

Quant à notre avenir commun – l’avenir de nos deux peuples voisins – Andreï Kourkov, qui a passé l’été en Ukraine, le voit tragique. «Il y aura un mur psychologique qui existe d’ailleurs déjà, construit de la haine provoquée par la Russie elle-même. Aujourd’hui encore, on voit à Kiev les restes de voitures explosées, les ruines des maisons – la guerre est omniprésente. Plus tard, la Russie connaîtra le sort de l’Allemagne : personne ne voudra plus apprendre le Russe. Aujourd’hui les personnes âgées le parlent encore, tandis que les enfants passent spontanément à l’ukrainien. Il y a zéro intérêt pour la langue et la culture russes, bien que, dans certaines libraires et au marché des livres de la rue Petrovka, on puisse trouver tous les classiques. Mais personne ne les achète. Peut-être la situation changera-t-elle dans la génération après la guerre, la fin de la guerre étant la fin des bombardements de l’Ukraine par la Russie ».

Mais vous souvenez-vous qu’en 1948, trois ans seulement après la Seconde Guerre mondiale, Boris Pasternak avait entrepris une nouvelle traduction de Faust ? ai-je osé avancer. « La différence est que l’Allemagne a capitulé, tandis que la Russie n’a pas l’intention de le faire ; elle ne va jamais reconnaître son tort et demander pardon », martèle Andreï Kourkov. Je crains qu’il ait raison.

Depuis la tente des auteurs, nous avons procédé à la « Croisière littéraire » – une forme originale et très agréable trouvée par les organisateurs du festival pour présenter les débats. Celui qui m’intéressait était intitulé « Kiev et Moscou, les liaisons dangereuses » dans la version finale du programme, et « Dialogue Kiev-Moscou » à un stade préliminaire. Ce titre initial a contrarié certains qui trouvaient qu’un tel dialogue n’était ni possible ni souhaitable à l’heure qu’il est, tandis que d’autres – y compris moi-même – le trouvaient incorrect, car le présumé dialogue devait avoir lieu entre Andreï Kourkov et Isabelle Cornaz, une journaliste suisse. Après avoir passé plusieurs années en Russie, elle vient de publier un livre sur ses « adieux à Moscou ». Ce livre m’a beaucoup touché et je l’ai présenté à mes lecteurs, mais ceci ne fait d’Isabelle ni une Russe, ni une Moscovite.

© Nashagazeta.ch

Un « vrai » dialogue russo-ukrainien aurait-il été possible ? Peut-être pas, car Andreï Kourkov n’aurait accepté de parler qu’avec une personne ayant publiquement dénoncé Vladimir Poutine. De tels auteurs russes existent, mais ils sont en exil et n’ont pas été invités à Morges. Isabelle Cornaz a donc été choisie pour le rôle de la « Moscovite » : elle et Andreï ont parlé de la Russie quasiment au passé, comme si elle n’existait plus car pour eux elle est morte. Du moins provisoirement. 

Effectivement, il m’est difficile d’imaginer un ou une Russe, même très opposé(e) au pouvoir actuel, qui pourrait parler de son pays en ses termes. Je sais que, personnellement, je n’y arriverais pas. Mais peut-être une petite divergence d’opinions aurait-elle rendu le dialogue plus intéressant pour le public. Et nous aiderait-elle à avancer. J’espère de tout cœur qu’il y aura une suite.

PS Pratiquement tous les livres de Gouzel Iakhina et d’Andreï Kourkov ont été vendus. Quel succès !

24.08.2023
Gouzel Iakhina © N.Sikorsky

Dans quelques jours, le 5 septembre à 19 h, j’aurai le plaisir d’animer la première rencontre de la rentrée à la Fondation Jan Michalski. Rencontre donc avec l’écrivaine russe Gouzel Iakhina à l’occasion de la parution – suite à Zouleikha ouvre les yeux et aux Enfants de la Volga –, de son troisième roman intitulé Convoi pour Samarcande. Un ouvrage lui aussi publié par les Éditions Noir sur Blanc, son éditeur francophone, dans l’excellente traduction de Maud Maubillard, - les libraires en Suisse et en France le recevront aujourd'hui.
 
Gouzel et moi nous sommes rencontrés une première fois en 2017, à Zurich. L’auteure, d’origine tatar, née à Kazan, y présentait Zouleikha ouvre les yeux, son premier livre, écrit à 40 ans – ouvrage alors couronné par les plus prestigieux prix littéraires en Russie et que la célèbre écrivaine Lioudmila Oulitskaïa avait décrit comme « une œuvre puissante qui chantre l’amour et la tendresse à l’enfer ». Le deuxième roman, Les Enfants de la Volga, devait quant à lui recevoir, en France, le Prix du Meilleur livre étranger en 2021. Voici donc le troisième.
 
Dans une récente conversation avec Gouzel Iakhina qui se trouve à Moscou – vive le Zoom ! - , j’ai suggéré que ces trois livres qui traitent du passé soviétique sous divers angles peuvent être perçus comme une trilogie. Elle a consenti à cette perception, avouant toutefois qu’un quatrième texte était déjà en route. Une tétralogie donc ? N’est-elle pas lassée de ce sujet ? « Pas du tout, a-t-elle répondu. Je trouve ce thème inépuisable, bien que pendant quelques mois après février 2022 mon impression était que tous mes sujets avaient perdu de leur actualité. Puis j’ai eu le sentiment contraire, car l’étude de toutes les dimensions du totalitarisme a repris de l’importance ».  
 
Gouzel Iakhina, qui a dénoncé la guerre mais a préféré de ne pas quitter la Russie « aussi longtemps que ma vie et ma liberté ne sont pas en danger », explique le cauchemar actuel par ce passé soviétique et la peur héréditaire des russes. Franchement, cet argument m’irrite un peu : combien de temps encore pourrons-nous mettre les atrocités d’aujourd’hui sur le dos du passé ? Mais une chose est sûre : dans les trois romans de Gouzel Iakhina on trouve le même antagonisme entre l’homme et l’État ; la même question de la survie et de la préservation de l’humanité dans les conditions inhumaines que connut le pays que dans la Russie contemporaine. Le développement de ce mécanisme de la survie jointe à l’acceptation quotidienne de l’inacceptable finissent par déplacer les normes : l’anormal devient normal. Et s’impose, s’incruste. Ceux qui ne savent pas s’adopter meurent en premier.


 
Alors que dans les deux premiers romans des groupes ethniques se trouvent au centre de l’attention (les Tatars et les Allemands de Volga, tous deux victimes de la politique stalinienne), le personnage principal du Convoi pour Samarcande est la famine ; cette famine qui, dans les années 1920 et dans la seule région de la Volga touchait plus de quarante-cinq millions de personnes – six fois la Suisse.  
Un succinct synopsis du livre se trouve en quatrième page de couverture : « Dans les années 1920, en URSS, la famine fait rage dans la région de la Volga. Le gouvernement soviétique met sur pied des convois d’évacuation pour sauver les enfants. C’est l’un de ces trains que l’officier de l’Armée rouge Deïev prend en charge, avec à son bord cinq cents enfants, qu’il doit acheminer de Kazan, la capitale du Tatarstan, jusqu’à Samarcande. Pour atteindre le Turkestan, terre d’abondance épargnée par la famine, il faut faire un long voyage de milliers de kilomètres à travers les forêts de la Volga, les steppes de l’Oural, puis les déserts d’Asie centrale.

Au cours de ce périple, Deïev et ses passagers rencontrent des femmes et des hommes qui les aident et les nourrissent – héros du quotidien, bandits ou fonctionnaires au double visage. Avec la commissaire Blanche et l’infirmier Boug, il tente de protéger les enfants de la faim, de la soif, de la peur et du choléra. Deïev devra faire face aux fantômes de son passé, aux crimes commis au nom du pouvoir soviétique, et à la cruauté de son pays, pour lequel la vie humaine a si peu de valeur. Par son courage et sa bonté, cet homme sauve des centaines de vies ; en s’élevant contre les crimes de l’État soviétique, il montre un chemin possible vers la rédemption ».

Alexandre Pouchkine affirmait, dans sa « petite tragédie » sur Mozart et Salieri, que la scélératesse est incompatible avec le génie. La bonté de Deïev, est-elle vraiment compatible avec sa cruauté ? Comment les héros de la Grande guerre patriotique pouvaient-ils ensuite se retrouver dans le rôle de surveillants à Goulag ? De nombreux lecteurs russes reprochent à Gouzel Iakhina l’embellissement de la réalité. Lors de notre conversation, elle a avoué que « la mesure de l’horrible » dans le roman a été une de ses principales préoccupations. Les réactions reçues après sa parution l’ont convaincues que la perception de l’horreur est une affaire très personnelle – trop pour les uns, pas assez pour les autres.

Me concernant, je dirai « plus qu’assez ». L’image d’un petit garçon persécuté dans son délire par un pou géant m’a empêché de dormir pendant des nuits… Pourtant, malgré le sujet très douloureux qui s’y trouve abordé, en dépit des détails insupportables dans leur véridicité, ce livre revêt l’aspect d’un conte de fée : au final, le Bien et l’Amour vainquent le Mal. Gouzel Iakhina partage mon analyse en souriant : « Vous avez très bien compris ; pour moi, cette idée est la principale du roman : je veux croire qu’il ne parle pas seulement des atrocités de l’époque et des souffrances des gens, mais aussi de l’humanité comme condition de survie de tout société. Dans mon roman les enfants deviennent la mesure de l’humanité des adultes qui, dans d’autres circonstances, se seraient entretués. Mon roman affirme que la bonté se trouve même dans les cœurs les plus endurcis ; elle peut être réveillée et sauver les vies ».
Voudrions-nous tous croire à cela ?

Préparez vos questions et venez les poser à Gouzel Iakhina le 5 septembre, à la Fondation Jan Michalski. La rencontre se tiendra en russe, avec la traduction simultanée en français assurée par Maud Maud Maubillard. Voici les détails : https://fondation-janmichalski.com/fr/agenda/rencontre-litteraire-avec-gouzel-iakhina

Vous aurez également deux occasions de rencontrer Gouzel Iakhina lors du festival Livres sur les quais ainsi que, le 4 septembre, à la Librairie Payot Lausanne.

18.08.2023
(DR)

Ce livre, je l’ai trouvé par hasard – si l’on veut croire au hasard. Le nom de l’auteur ne me disait rien, mais son titre a attiré mon attention dans une pile rangée avec soin dans une de ces cabines téléphoniques désaffectées, transformées en point d’échange d’ouvrages lus et abandonnés. Lolita à Téhéran ?! Impossible !

Et pourtant j’ai découvert que ce livre, paru en 2003 déjà, fêtait alors son 20ème anniversaire. J’ai découvert également qu’en 2009 il avait été placé, par The Times de Londres, dans la liste des « 100 meilleurs livres de la décennie », et même qu’il avait été traduit, parmi trente-deux autres langues, en russe – en 2022, juste à temps ! L’autrice en est Azar Nafisi, fille de l’ancien maire de Téhéran et de la première femme membre du parlement iranien. Ayant obtenu son doctorat en littérature anglaise et américaine à l'université d'Oklahoma, aux États-Unis, elle est rentrée en Iran pour y enseigner entre autres à l’université de Téhéran. Mais la révolution iranienne survenue en 1979 a eu pour résultat l’exil du shah Mohammad Reza Pahlavi, la prise du pouvoir par l’Ayatollah Khomeiny et l’instauration de la République islamique. En 1981, Azar Nafisi s’est vue renvoyée de l’université pour refus du port du voile islamique. Ce n’était là qu’une formalité, car le 5 juin 1980 déjà, le début de la « révolution culturelle » avait été marqué par la fermeture des établissements de l’enseignement supérieur. En 1997, Azar Nafisi est retournée aux États-Unis, où elle a enseigné pendant vingt ans à l’université John-Hopkins à Baltimore ; ayant obtenu en 2008 la citoyenneté américaine, elle habite maintenant à Washington où elle continue à écrire. Je note aussi qu’en 2006 elle a rédigé la préface à une nouvelle édition de Hadji-Mourat de Léon Tolstoï, parue dans la série Modern Library, et qu’en juin 2019 Yale University Press a publié son livre consacré à Vladimir Nabokov et intitulé That Other World.

Mais revenons à cette Lolita de Téhéran d’il y a vingt ans que j’ai emportée avec moi pour la lire tranquillement pendant mes vacances à la plage. À peine en ai-je lu les premières pages qu’une jeune femme en bikini orange s’est posée sur le transat à côté du mien. Ayant jeté un coup d’œil distrait sur mon livre, elle m’a demandé en français : « Êtes-vous iranienne ? » « Non, je suis Russe ». « Russe ?! – étonnement non dissimulé suivi par un signe de tête : Alors, vous comprendrez tout, vous avez eu une révolution, vous aussi ». Eh oui…

Une heure et demie durant, nous avons parlé de la mort, survenue en septembre 2022, de Mahsa Amini, Kurde iranienne de 22 ans arrêtée par la police qui lui reprochait d'avoir enfreint le code vestimentaire de la République islamique, lequel impose notamment aux femmes le port du voile en public. (Il suffit d’intervertir deux lettres pour que la Mahsa kurde devienne une Masha russe.) Nous avons aussi évoqué le courage des femmes iraniennes descendues dans les rues pour protester. Le fait que, dès le 18 juillet 2023, les patrouilles de la police des mœurs ont été rétablies en Iran pour arrêter et sanctionner les femmes qui désobéissent aux ordres et continuent de ne pas respecter le code vestimentaire. Le fait, enfin, que, de retour de vacances, ma nouvelle connaissance sera obligée de cacher sa ravissante beauté sous des habits noires.

Mais que ce passe-t-il ? Le temps s’est-il arrêté ? A-t-il fait un virage à 180 degrés ?

Le livre d’Azar Nafisi appartient au genre du roman documentaire. C’est une histoire vraie, autobiographique, bien que les noms des personnages soient modifiés pour des raisons évidentes. Le sujet paraît simple : suite à la persécution de tout ce qui vient de l’Ouest dans le cadre de la « révolution culturelle », à la fermeture des librairies spécialisées en littérature étrangère et à l’interdiction de l’enseigner dans les universités, une professeure – Azar Nafisi donc – organise un groupe d’études chez elle. En arrivant dans sa maison, les étudiantes ôtent leurs voiles islamiques, restent en jeans et T-shirts et se plongent dans des discussions autour de leur Mille et une nuits natales, mais aussi de livres aussi inadmissibles dans la société iranienne d’aujourd’hui que sont Lolita et Invitation au supplice de Vladimir Nabokov, Gatsby le Magnifique de F. Scott Fitzgerald, Emma et Orgueil et préjugés de Jane Austen, Madame Bovary de Gustave Flaubert et même L’hiver du doyen de Saul Bellow. Ce cercle secret des bibliophiles se transforme rapidement en un club dont les membres débattent de problèmes politiques et de leur intrusion dans la vie privée. Il est important de noter que bien qu’une partie du groupe soit issue de familles conservatrices et religieuses et que l’autre provienne de milieux laïcs, le dialogue reste possible.

En lisant ce livre, je n’ai pas pu m’empêcher de tirer des parallèles non seulement entre l’histoire de la Perse – qui a donné au monde tant de poètes extraordinaires – et la République islamique d’Iran, mais aussi avec leurs homologues russo-soviético-russes car chez nous aussi, pour citer Azar Nafisi, « la vie est aussi capricieuse que le temps en avril quand les brèves périodes du soleil cèdent la place aux pluies et orages ». Oh que c’était difficile en URSS, considéré pendant longtemps comme le pays le plus lettré du monde, d’obtenir de bons livres – non seulement étrangers, mais aussi « nôtres ». Jusqu’à la perestroïka de Mikhaïl Gorbatchev les œuvres de Marina Tsvétaïeva, Anna Akhmatova, Boris Pasternak, Ossip Mandelstam et de tant d’autres excellents auteurs russophones n’étaient disponibles – bien que publiées en Russie ! – que dans les magasins réservés aux étrangers où ils étaient vendus contre hard currency, ou chez les bouquinistes, à des prix faramineux en roubles. Il existait aussi, en URSS, des « cercles secrets » qui ressemblaient comme deux gouttes d’eau à ceux décrits par Azar Nafisi. Dans mon école élitiste de Moscou, en restant après les classes avec une enseignante passionnée, j’ai découvert la poésie de Severianine, Khlebnikov, Brodsky… Je vous ai déjà raconté qu’en 1982 on m’avait prêté le quatrième des six exemplaires de Lolita dactylographiés sur une machine à écrire à l’aide de papier carbone – pour vingt-quatre heures seulement : les personnes avides de le lire à leur tour refusaient de patienter davantage. Tous les régimes totalitaires ont une chose en commun : la peur de la bonne littérature.

« Nous, ceux qui habitions la République islamique d’Iran, avons parfaitement saisi la tragédie ainsi que l’absurdité de la cruauté à laquelle nous étions sujettes. Nous avons appris à voir les côtés drôles de notre misère pour survivre. Nous reconnaissions instinctivement le poshlust – non seulement chez les autres, mais aussi chez nous-mêmes », écrit Azar Nafisi. Il suffit de remplacer le nom du pays pour que les souvenirs m’envahissent.

Il est intéressant de noter que Mme Nafisi translitère le mot russe poshlost [banalité, vulgarité], l’un des préférés de Nabokov, en poshlust – comme si elle le prononçait à la manière moscovite, avec « a » à la place de « o », et en rajoutant un sens supplémentaire avec ce lust – « désir physique », « convoitise de la chair » en français. 

« Nabokov a saisi la texture de la société totalitaire, dans laquelle un individu est complètement seul dans un monde illusoire plein de promesses futiles, dans un monde où il n’est plus en mesure de distinguer son libérateur de son bourreau », écrivait Azar Nafisi il y a vingt ans de cela, en « adaptant » les réflexions de l’écrivain russe du XXe siècle à la réalité iranienne, et en nous les renvoyant aujourd’hui afin que nous les adaptions à notre réalité à nous.

Voici encore une citation : « Nous vivions dans une culture qui niait toutes les valeurs des œuvres littéraires autres que leur utilité à l’idéologie. C’était un pays où chaque geste, même le plus intime, était interprété dans un sens politique ». On dirait qu’elle parle de la Russie.

Moi aussi, j’ai grandi dans un pays où les écrivains ont souvent été jugés non pour leur talent mais en vertu de leur loyauté au Parti communiste ; où les meilleurs étaient les premiers à périr et où la grande littérature mondiale a constitué la seule lucarne par laquelle un vent frais arrivait de derrière le Rideau de fer en nous aidant à former nos opinions et notre identité ; à préserver notre dignité et le sens de la liberté dans une société privée de liberté. Pendant un moment nous, les Russes, avons cru que tout cela était terminé. Mais hélas, les temps ténébreux sont de retour et il nous appartient d’accepter le rôle de l’éternelle victime – à la manière de Lolita, fillette sans défense, incapable même de formuler sa propre histoire ou de s’approprier son destin.

Tout en admirant Azar Nafisi, je ne peux que regretter que son livre, vingt ans après, reste d’une telle actualité. Je vous le recommande vivement, dans la langue de votre choix, ainsi que sa toute dernière œuvre dont le titre parle pour lui-même : Lire dangereusement : la littérature subversive dans les temps troubles.

P.S. : Je profite pour vous rappeler que l’exposition consacrée à Vladimir Nabokov à la Fondation Jan Michalski reste ouverte jusqu’au 3 septembre – ne la ratez surtout pas !

A PROPOS DE CE BLOG

Nadia Sikorsky a grandi à Moscou, où elle a obtenu un master de journalisme et un doctorat en histoire à l’Université d’Ètat de Moscou. Après 13 ans au sein de l’Unesco à Paris puis à Genève, et exercé les fonctions de directrice de la communication à la Croix-Verte internationale, fondée par Mikhaïl Gorbatchev, elle développe NashaGazeta.ch, quotidien russophone en ligne.

En 2022, elle s’est trouvée parmi celles et ceux qui, selon la rédaction du Temps, ont « sensiblement contribué au succès de la Suisse romande », parmi les faiseurs d’opinion et leaders économiques, politiques, scientifiques et culturels – le Forum des 100.

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